
Le conseil communal de Tervuren du 28 août 2025 marquait la rentrée politique après la pause estivale. La séance, dense et parfois houleuse, a été dominée par un long débat sur la nouvelle tarification des déchets ménagers (Diftar), qui a révélé pour la première fois un vote clivé au sein de la majorité.
Prise de connaissance du courrier de la ministre Hilde Crevits adressé à la commune, suite à la plainte de Serge Liesenborghs (Tervuren Unie+Volt)
En complément d’information : Ce courrier fait suite au recours introduit le 29 mars dernier contre une décision du collège du 3 mars, établissant un règlement à l’attention des marchands ambulants du marché du vendredi. Ce règlement imposait aux commerçants « d’utiliser le Néerlandais comme langue d’interpellation (« aanspreektaal ») dans la communication écrite et orale ». Le conseiller a demandé lors du conseil communal du 27 mars de modifier cette obligation, parce qu’inconstitutionnelle, illégale, contraire aux pratiques commerciales et ne favorisant pas une vie communautaire harmonieuse. Le bourgmestre a alors répondu, (avec une mauvaise foi évidente, ndlr) que cela ne visait que la langue utilisée avec l’administration. Le conseiller Serge Liesenborghs a alors porté la question à l’ABB. Apprenant cela, le collège s’est empressé de modifier le règlement pour éviter de se faire « crosser » par la ministre, en transformant l’obligation en «conseil » (aanbeveling), mais en ajoutant « la communication entre le commerçant et l’autorité communale, ainsi que ses préposés, doit se faire exclusivement en Néerlandais ».
La ministre donne raison au plaignant, en rappelant qu’une obligation linguistique serait inconstitutionnelle. Mais la ministre va encore plus loin, en signalant que même dans les contacts avec l’administration communale, l’obligation linguistique ne vaut QUE pour les commerçants établis dans la région linguistique homogène flamande. La clause ne peut donc pas être utilisée avec un commerçant établi à Bruxelles ou dans une commune flamande à facilités. Dont acte ! Merci madame la ministre.
Nous observons une fois de plus que la majorité communale cherche, en dépit de la loi et de l’intérêt des citoyens, de règlementer dans une matière fédérale.
Points administratifs
Les désignations de représentants pour Interleuven et Toerisme Vlaams-Brabant furent validées, la seconde par un vote secret qui confirma Bram Bartholomees (Echevin, Voor Tervuren). Le conseil prit également connaissance des rapports sur les intercommunales et des plaintes déposées en 2024. Sur ce dernier point, la conseillère Carine Borghans (Groen+Vooruit) souligna le problème du manque de places en crèche ; l’échevin compétent évoqua des projets en cours pour recruter du personnel et développer de nouvelles infrastructures, sans perspective immédiate.
Sanctions administratives et mobilité
Deux décisions techniques désignèrent de nouveaux agents habilités à infliger des amendes administratives, notamment pour le stationnement. À une question, il fut précisé qu’aucun projet n’existe actuellement pour installer des radars ou caméras automatiques, mais que cette option reste ouverte pour l’avenir.
Logement et sortie de KANVAZ
Le conseil valida à l’unanimité la sortie de la société de logement KANVAZ. Des interrogations furent posées sur le transfert des terrains concernés, l’exécutif assurant que la procédure était en cours et suivie de près.
Personnel et enseignement
La prime de pension pour les enseignants communaux sera augmentée. Geoffroy de Visscher (Tervuren Unie + Volt) interrogea l’impact budgétaire global : la direction confirma une charge limitée à quelques cas par an. Les règlements scolaire et de travail furent adaptés et approuvés sans débat.
Politique du logement et de l’eau
Le dossier de subsides pour la politique du logement local de l’organe de coopération intercommunal (IGS), cluster Druivenstreek fut approuvé, le conseiller Bram Peters (Groen+Vooruit) saluant l’intégration du certificat de conformité. Une convention avec De Watergroep transféra de nouveau à la commune la responsabilité de l’assainissement, afin de maintenir la gestion locale du réseau d’égouttage.
Travaux publics
Le cahier des charges pour les travaux d’égouttage à la Vestenstraat et à la Louis Buelenslaan suscita un débat. Bram Peters (Groen/Vooruit) critiqua l’option d’une circulation à double sens, préférant une conception plus cohérente pour la mobilité douce ; sa faction s’abstint. Geoffroy de Visscher souligna la perte de places de stationnement et demanda des garanties sur les délais et pénalités ; le collège répondit que le délai était fixé à 125 jours mais reconnut l’absence de précision sur les sanctions financières en cas de retard.
Tarification des déchets ménagers (Diftar)
Le moment fort de la séance fut l’examen du nouveau règlement de redevance pour la collecte des déchets, introduisant un système Diftar au poids. L’échevin Trappeniers rappela les objectifs : réduction des tonnages (de 130 à 90 kg par habitant), principe du « pollueur-payeur », rues plus propres, et alignement sur l’expérience de nombreuses communes flamandes.
L’opposition, en la personne de Geoffroy de Visscher (TU+Volt), dénonça une réforme « radicale » et coûteuse : selon ses calculs, une famille type verrait sa facture multipliée par trois à cinq, avec en outre une diminution du service (ramassage bimensuel au lieu d’hebdomadaire, obligation d’utiliser des conteneurs, contraintes accrues pour les habitants du centre). Il alerta aussi sur les risques de fraude (déchets déposés dans le conteneur du voisin), de vandalisme, d’odeurs et de surcharge pour les aînés. Huit questions techniques furent posées sur l’obligation de louer un bac GFT, la sécurité des données, les sanctions prévues et la transition avec l’ancien système de sacs.
Le collège répondit point par point : le GFT reste facultatif, un cadenas peut sécuriser le conteneur, les infractions seront suivies par Interrand, et les sacs restants pourront être échangés. Le bourgmestre défendit vigoureusement la réforme comme « nécessaire et inévitable », insistant sur l’expérience d’autres intercommunales et sur la nécessité de réduire les coûts de traitement des déchets.
Les tensions furent particulièrement vives au sein de la majorité : le groupe N-VA exprima publiquement son malaise, soulignant les coûts accrus et la lourdeur opérationnelle du système. Ses membres se divisèrent lors du vote, certains soutenant par loyauté à la coalition, d’autres s’abstenant. Ce vote hétérogène fut inédit et marqua les esprits.
Les conseillers Tervuren Unie+Volt apportèrent une contribution notable :
- Tracey D’Afters insista sur l’importance d’agir aussi auprès des commerces et supermarchés pour réduire les emballages.
- Serge Liesenborghs demanda des clarifications sur les dates d’entrée en vigueur, distinguant bien la phase pilote (1er octobre 2025) et la généralisation (1er mars 2026).
- Olivier Thomas rappela la nécessité de respect dans le débat, après des propos polémiques visant un entrepreneur local.
Au final, le règlement fut approuvé, mais dans un climat tendu, révélant pour la première fois des fractures visibles dans la majorité.
Subsides « d’impulsion » aux associations
Le collège proposait une adaptation des “subsides d’impulsion” à l’attention des associations sportives, culturelles et de jeunesse reconnues par la commune. Ces subsides, d’un montant de maximum 2 x 1500 euros par an sont octroyés pour favoriser les associations qui renouvellent leur fonctionnement autour de plusieurs thèmes, sélectionnés sur base du plan pluriannuel de la majorité. La nouvelle majorité proposait donc deux adaptations :
- favoriser les associations qui s’enregistrent comme partenaire UITPAS et rendent public le tarif social;
- introduire un thème “stimulation linguistique”, soit l’encouragement des actions autour de l’usage du néerlandais auprès des membres, des gestionnaires et des parents. Les actions possibles seraient : organiser un workshop pour offrir un accompagnement et informer sur les outils visant la stimulation linguistique; la mise en place d’actions autour de la diversité linguistique pour les parents, etc
L’échevine Annemie Spaas (NVA) justifiait ce thème par le fait que en 2024, à Tervuren, 54,3% des jeunes entre 0 en 24 ans sont d’origine étrangère; et que la langue parlée de la mère à son bébé est dans 67,8% des cas autre que le néerlandais (chiffres de Agentschap Groeien).
Serge Liesenborghs intervint, disant d’abord “comprendre la préoccupation de la commune”, mais qu’elle ne doive pas devenir une “obsession compulsive”. Il rappela que l’objectif d’une association sportive, par exemple, est de favoriser la pratique sportive et d’attirer des membres, pas de remplir le rôle politique que la commune entend mener. Il souligne que la commune ne peut pas imposer de telles obligations à une association, ni même les encourager sous forme de subside complémentaire. Les responsables de club ont bien d’autres chats à fouetter!
La conseillère Lut Kint (NVA) prit alors la parole en soulignant notamment que “la gestion linguistique (taalbeleid) est le core-business de la commune”.
Le conseiller Ralph Pakket (NVA) se lance alors dans une diatribe (en élevant la voix, ce à quoi le président Mario Van Rossum lui rappela qu’il disposait d’un micro) en soulignant qu’il a aussi le soutien d’allophones, ceux qui ont fui Bruxelles pour le caractère charmant et flamand de Tervuren. Il reproche alors à Liesenborghs de vouloir copier à Tervuren la politique multiculturelle catastrophique (ramp) en vigueur à Bruxelles.
En dernière réplique, Liesenborghs signale que l’intervention précédente dévie complètement du sujet, alors qu’on parle ici de demander aux associations des activités qui ne sont pas prévues dans leurs statuts.
Propositions et questions orales
Deux propositions furent introduites :
- par (Bram Peters, Groen+Vooruit) : un règlement de subsides en faveur de mesures de prévention contre les inondations, La proposition devant être étudiée par le collège, le conseiller a accepté de surseoir au vote. 150 maisons seraient potentiellement concernées par la problématique.
- par Elmo Peeters (Groen+Vooruit) : prendre action, à l’instar d’autres communes, pour tracer une ligne rouge et dénoncer le génocide à Gaza. Parmi les actions proposées, le conseil vota les propositions suivantes : hisser le drapeau de la paix, et étudier la possibilité d’adapter les marchés publics avec une clause sur les droits de l’homme.
Le conseil ne suivit pas le conseiller sur les propositions de hisser un drapeau Palestinien, de signer la pétition de la ville de Mesen (qu’il faut laisser à l’appréciation de chacun), de reconsidérer la collaboration avec des entreprises qui seraient liées au génocide à Gaza.
En fin de séance, plusieurs questions orales furent posées :
- Sur la proposition du Fietsersbond visant l’élargissement de la zone 30 aux rues Lindeboom, Ortar De Pauw et Jezus-Eiklaan (Carine Borghans). L’échevin Marc Charlier (NVA) estime que le risque d’accident dans cette zone est assez faible pour maintenir la vitesse maximum à 50 km/h.
- Sur les actions prises en réponse aux problèmes de cohabitation dans le quartier social de Moorsel (Groenwijk) (Carine Borghans). Le bourgmestre Geyns (Voor Tervuren) a répondu de façon claire sur la façon dont la problématique est suivie par la commune
- Enfin, Geoffroy de Visscher interrogea sur l’avancement des travaux et de la déviation sur la Duisburgsesteenweg. Il relaya l’inquiétude de riverains confrontés à des détours longs et mal signalés, ainsi qu’à des nuisances pour les commerces. Le collège reconnut la complexité du chantier mais assura que la communication serait renforcée et que des ajustements de circulation étaient envisagés pour réduire les désagréments.
Conseil CPAS
La séance CPAS, plus courte, approuva le procès-verbal de juin, supprima une décision de 2019 limitant le montant des jetons de présence au BCSD et valida l’aperçu actualisé des intercommunales liées à l’action sociale.
Conclusion
Cette rentrée communale fut marquée par un contraste : une série de points administratifs adoptés sans discussion, et un débat exceptionnellement long et tendu sur la tarification des déchets. Le vote hétérogène de la majorité sur ce point illustra une fracture politique inédite. Signalons aussi la sortie hors de propos et excessive du nationaliste flamand Pakket. Les conseillers de Tervuren Unie + Volt jouèrent un rôle actif et constructif : vigilance financière (de Visscher), attention sociale et économique (D’Afters), conformité réglementaire (Liesenborghs) et appel au respect du débat démocratique (Thomas).