
Diftar à Tervuren : une réforme injuste, coûteuse et sans vision
Le 28 août 2025, le conseil communal de Tervuren a approuvé l’instauration du système Diftar au poids pour la collecte des déchets ménagers. Dès 2026, chaque ménage devra présenter ses déchets dans un conteneur équipé d’une puce et d’un système de pesée. La facture ne sera plus calculée en fonction du nombre de sacs achetés, mais du poids exact de déchets résiduels et de GFT présenté à la collecte.
La majorité a présenté cette réforme comme une « avancée inévitable » et un « choix écologique responsable ». Pourtant, la réalité est toute autre : le projet a été adopté dans l’improvisation, sans business case solide, sans transparence sur son coût réel, et contre l’avis d’une partie de la majorité elle-même.
Les promesses affichées par le collège
Les défenseurs de Diftar avancent quelques arguments, qui méritent d’être rappelés avant d’être confrontés à la réalité :
- Réduction des tonnages : ailleurs en Flandre, le passage au poids aurait entraîné une baisse de 20 à 30 % du volume de déchets résiduels.
- Pollueur-payeur : chaque ménage paie en fonction de ce qu’il jette, ce qui paraît plus équitable que le système actuel basé sur le volume des sacs.
- Rues plus propres : fini les sacs déchirés par les animaux, les conteneurs limiteraient les nuisances et le désordre.
- Données de gestion : le système fournirait des chiffres détaillés pour améliorer le plan déchets de la commune.
Mais ces arguments ne suffisent pas à masquer les énormes faiblesses du projet tel qu’il a été décidé à Tervuren.
Une facture qui explose pour les ménages
Aujourd’hui, une famille de cinq personnes qui sort environ 30 sacs de 60 litres par an paie 51 €. Avec Diftar, la même famille, en gardant ses habitudes actuelles, paiera 232 €, soit 4,6 fois plus.
Même en admettant une réduction des tonnages (de 130 kg à 90 kg par personne), la facture annuelle restera de 169 €, plus de trois fois plus élevée qu’aujourd’hui.
Les élus de la majorité osent affirmer que « qui trie mieux paiera moins ». C’est faux. Dans le meilleur des cas, la facture sera multipliée par trois. Dans le pire, par cinq. Le discours officiel est une manière maladroite de maquiller une hausse d’impôt déguisée.
Moins de service, plus de contraintes
Payer plus pour moins : voilà ce que Diftar signifie pour les citoyens de Tervuren.
- La fréquence de collecte sera divisée par deux : une fois toutes les deux semaines au lieu d’une fois par semaine.
- Les habitants du centre n’auront même plus de ramassage en porte-à-porte : ils devront se déplacer jusqu’à des conteneurs enterrés. Pour les personnes âgées ou les familles nombreuses, ce sera une contrainte lourde et injuste.
- Les commerces, eux aussi, devront s’adapter sans qu’aucune solution spécifique ne soit prévue.
La conséquence est claire : les ménages paieront beaucoup plus cher pour un service deux fois moins fréquent.
Des risques connus et minimisés
De nombreuses communes ayant déjà adopté Diftar connaissent des problèmes que Tervuren feint d’ignorer :
- Zwerfvuil : les dépôts clandestins augmentent lorsque jeter devient trop cher.
- Fraude : des sacs sont placés dans les conteneurs des voisins, facilement identifiables par l’adresse liée à la puce.
- Conteneurs vandalisés ou volés : chaque ménage devra stocker un bac encombrant et vulnérable. et si le container est vandalisé ou volé, ce seront encore une fois les ménages qui devront passer à la caisse…
- Mauvaises odeurs et parasites : les déchets, surtout organiques, fermenteront deux semaines avant d’être collectés.
- Conteneurs enterrés en panne : lorsqu’un point de collecte est hors service, les riverains n’ont aucune alternative.
Ces risques ne sont pas hypothétiques : ils sont documentés ailleurs.
Une majorité divisée, fait inédit
Lors du vote du 28 août, la N-VA, pourtant membre de la majorité, a exprimé son désaccord. Ses élus ont dénoncé la hausse des coûts, la perte de service et l’inefficacité du système. Résultat : vote divisé, certains élus N-VA s’abstenant, d’autres votant pour « par loyauté », sans cacher leur malaise.
Il s’agit d’un fait politique inédit : jamais encore la majorité ne s’était scindée sur un dossier aussi important. La réforme a donc été adoptée, mais dans un climat tendu, et sans consensus.
L’angle mort : l’absence totale de business case
Le point le plus préoccupant est peut-être celui-ci : la commune s’est lancée dans cette réforme sans avoir la moindre idée de son impact financier global.
Aujourd’hui, Tervuren verse 2,8 millions d’euros par an à Interrand pour la collecte et le traitement des déchets. Lors du débat, les conseillers ont demandé quel montant serait économisé grâce au passage au Diftar. La réponse du collège fut édifiante :
- Aucune estimation n’est disponible.
- Aucune simulation financière n’a été fournie.
- Le collège admet que les premières années, la facture communale restera identique.
En clair : les coûts pour la commune restent constants, et les coûts pour les ménages explosent. Résultat : une double charge, sans aucune garantie d’économie future.
Geoffroy de Visscher l’a résumé ainsi : « Nous nous lançons dans une réforme radicale, qui bouleverse la vie quotidienne de chaque citoyen, sans savoir si elle rapportera quoi que ce soit. »
La N-VA a ajouté que, même à long terme, le système est structurellement plus coûteux : les camions sont plus chers, la collecte plus lente, le personnel doit manipuler chaque bac. La promesse d’une baisse des coûts pour la commune est donc illusoire.
Une injustice fiscale flagrante
Diftar fait reposer 85 % des coûts sur les ménages via les redevances, contre seulement 15 % financés par les recettes fiscales générales.
Or, la collecte des déchets est une mission communale de base, qui devrait être financée collectivement, et non transformée en « taxe au kilo » indistincte. Ce système est profondément injuste : une famille modeste paiera autant au kilo qu’une famille aisée.
Les alternatives ignorées
Depuis des années, Tervuren Unie plaide pour une réévaluation du partenariat avec Interrand. D’autres pistes existent :
- Interza (Zaventem, Wezembeek-Oppem) : coûts maîtrisés, satisfaction des citoyens, service flexible.
- Bruxelles-Propreté : opérateur public expérimenté qui gère la capitale et pourrait proposer des formules adaptées.
- Opérateurs privés comme Veolia ou Van Gansewinkel, capables de fournir des solutions compétitives et innovantes.
Jamais ces options n’ont été étudiées sérieusement. La majorité actuelle, comme la précédente, s’est enfermée dans une dépendance à Interrand, acceptant ses choix sans débat et en refusant toute mise en concurrence.
Conclusion : une réforme imposée, pas une fatalité
Le système Diftar à Tervuren n’est pas une nécessité écologique, mais un choix politique opaque et mal préparé.
- Pour les citoyens : une explosion de la facture, un service réduit, de nouvelles contraintes et des risques de fraude et de zwerfvuil.
- Pour la commune : des coûts constants, aucun plan d’économie, et une dépendance accrue à Interrand.
- Pour la majorité : une division interne révélée au grand jour, signe de l’inconfort face à une réforme rejetée par une grande partie de la population.
Tervuren Unie continuera à informer les citoyens et à dénoncer cette politique injuste. Nous plaidons pour un système de gestion des déchets équitable, transparent, compétitif et réellement au service des ménages de Tervuren.